Pavillon de l’Arsenal Posted on 1 novembre 2024 By Mike C’est hypocritement que le système culturel prétend se mettre à l’écoute de l’architecture de son époque et la soutenir en l’encourageant par tous les moyens. Tandis qu’il s’empresse de réprouver toute idée concernant son autonomie et érige ses victimes en juges, l’autoritarisme, qu’il tient bien caché, dépasse tous les excès autorisés. C’est qu’en effet, tandis que le système feint de s’ouvrir au « nouveau », qu’il érige comme unique étalon d’authenticité et condition d’appartenance à l’époque actuelle, c’est pour moins vraiment s’y adapter – en aurait-il honnêtement l’intention qu’il n’en serait pas forcément capable – que pour les stimuler par anticipation ; en réalité c’est lui qui façonne à la fois les contours notionnels du « nouveau » que les critères catégoriques qui y renverront dès qu’il en aura décidé l’ordre. C’est lui qui inculque aux architectes ce que l’architecture doit être ; en se comportant, comme s’il était lui-même au faîte de l’architecture : à chaque fois qu’il est nécessaire, et bon pour le système économique, elle édicte selon les divers moyens à sa disposition, les canons, les règles et les tendances auxquelles il faudra, jusqu’à nouvel ordre, répondre pour agréer aux commanditaires qui, en cela, ne font à leurs tours, que répondre aux intérêts des investisseurs. Que tous ces ajustements auxquels le système assure obéir impliquent une composante idéologique est finalement secondaire ici ; au besoin celle-ci peut même être mise en question ; malgré leurs dires, et agissements serviles, secrètement, les architectes n’aspirent à rien tant qu’à s’adapter aux autres, à ce que lui commande le système à travers les institutions, qu’il recherchera toujours davantage à participer au pouvoir en s’en rapprochant au plus près et le plus longtemps, et à subvertir l’égalité dont il revendique la marque et la jouissance pour lui-même. La déontologie de carnaval que défend l’Ordre des architectes n’est, et ne sera, jamais suffisante à maintenir cette illusion d’égalité ou de confrérie. Celui-ci relève d’un serment d’ordre moral. Or, ce n’est pas cela qui préside à la réalité sociale, mais, au contraire, le système économique, lequel, prend pour l’occasion les atours de la culture, tant pour en commander intrinsèquement le fonctionnement que pour en constituer les modalités utiles. Voilà pourquoi, bien qu’une institution si illustre et importante que le « Pavillon de l’Arsenal » ne puisse travailler que pour le bien de l’architecture reste une affirmation en mal de validation, ne l’empêche aucunement dans son rôle d’institution culturelle, de régner de façon despotique sur le petit monde architectural. En prodiguant aux architectes « l’architecture pour les architectes », elle agit à l’échelle de trust sur l’ensemble du secteur de l’architecture pour le bien et les profits de celui du bâtiment. Aux services de groupements d’entreprises dont elle peut percevoir les subventions – denrées subsidiaires importantes en ces temps difficiles depuis que, précisément, le monde de l’entreprise à compris son influence sur la culture et le peu d’importance que celle-ci pouvait avoir en réalité si elle n’était pas façonnée en fonction de besoins autrement plus sonnants et trébuchants. Quoique conservant son autonomie au moins juridique d’institution publique, elle reste sous le contrôle direct du monde du Bâtiment pour mieux inféoder ceux dont il est utile d’obtenir les services à peu de frais. L’astuce odieuse reposera sur les mécanismes psychologiques de la vanité et l’orgueil de ces personnages. En faveur d’une illusion du moment de célébrité et de reconnaissance, l’institution déverse sur les architectes, des discours éloquents, les idées creuses et factices, souvent douteuses et ineptes du point de vue de l’architecture, qui correspondent surtout à ce qu’elle attend en retour de leurs actions, précisément, en fonction et dans les termes, qu’elle veut provoquer et retrouver au final. La rhétorique et la communication font le reste, et le nouveau « nouveau » est prêt à être vendu et consommer. Malheur à ceux qui ne s’y tiendraient pas ; la méthode consiste finalement à anticiper ce à quoi et comment les architectes n’auront qu’à s’imiter eux-mêmes en faisant apparaître l’approbation qu’il s’agit pour cela de susciter comme déjà effective. Ceci sera rendu d’autant plus facile lorsqu’il s’agit d’une institution publique qui œuvrera à fournir le cadre stable pour les intérêts du système qui l’instrumentalise. En réalité, il s’agira moins d’encourager une quelconque approbation qu’à entretenir le consentement. Une telle manipulation reposant sur des atavismes mimétiques refoulés confronte le système culturel face à ses responsabilités dans la régression où se situe la culture en général, les arts en particulier et, plus singulièrement encore, l’architecture. Toutes les expositions qu’organisent ce type d’institutions, d’abord et avant tout, montées pour le petit cénacle des élites architecturales qui y sont inféodées, tient plus à la volonté de montrer ce qu’il y a à recopier plutôt que de montrer quelque chose d’innovant, ou même de différent. Répondant en cela à la loi de la rentabilité pure, son objectif est de présenter un produit à diffuser à la plus large échelle possible en un temps aussi court possible. Il n’est pas vraiment question d’exposer autre chose qu’un modèle, un patron, à reproduire. De là, les nouvelles expositions ronflantes tous les six mois, le substitut, la vacuité, sinon la nullité de l’architecture débile, le tour accrocheur, pompeux et fat ; tout doit sembler exprimer la nouveauté, l’innovation, le différend, etc. C’est en usant d’un tel procédé, que le système assaillit les architectes en mal de participation et de reconnaissance, lesquels, se précipitent – un peu par fatalité, un peu par habitude hébétée pour les plus habitués- , avec un enthousiasme niais et idiot, plein d’illusions pour les plus jeunes. Mais, à chaque fois, ce que dicte l’exposition demeure toujours le discours tacite des écoles de commerce d’un accord gagnant-gagnant, à travers lequel, il s’agit moins de rechercher le meilleur compromis de partage des gains réels en jeu, mais de trouver un accord qui augmente les gains de chacun pour seulement pouvoir jouer. Ceci serait encore intéressant si le présupposé psychologique et humaniste sur lequel repose un tel accord n’était justement pas celui de l’égalité des parties, puisque cette dernière, quand elle serait, n’est ni reconnue, ni respectée. L’annonce n’est ni plus ni moins plutôt : « Ce qui profite à mon profit peut être profitable au tien ». En architecture, nombre d’architectes ont su tirer parti de ce mécanisme simple et efficace, ou bien rêvent de le faire. Le « Pavillon de l’Arsenal » qui a mis en place ce type de procédés leur assure aussi bien la pérennité professionnelle aux plus cyniques que les opportunités attentistes aux plus arrivistes. Quand l’un ou l’autre de ces derniers ne satisfera plus, ce sera au « Centre Pompidou » ou à « l’Institut Français de l’Architecture » qu’il reviendra d’assurer l’encensement valant pour reconnaissance méritoire et préfigurant la commémoration qu’il convient dans un tel système d’anticiper simultanément. L’erreur n’étant jamais reconnue, les honneurs qui rétribuent un parcours ne recouvrant jamais tant de gloire que ceux qui en dispensent les mérites à leurs gouts. Chacun est prévenu, il suffit de ne pas confondre entre célébrité et publicité ou ne plus hésiter entre l’une et l’autre. Non classé
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