Note liminaire. Une des seules alternatives dont il est encore possible d’assumer la responsabilité face à la désespérante situation de l’architecture aujourd’hui, est la tentative de la rétablir dans ses droits, et lui rendre l’estime qui lui revient. Pour se sauver, l’architecture doit saisir ce qui la conditionne en son entier. Elle n’a d’autre issue que celle de porter un regard lucide sur elle-même. Elle doit comprendre ce à quoi elle est réduite, comment et pourquoi. Pour cela, il faut établir les différents points d’observation depuis lesquels l’architecture puisse apparaitre telle qu’elle est aujourd’hui, étrangère à elle-même, indigente, absolument dénaturée. Construire de telles perspectives sans apriori ni préjugés, uniquement à partir du contact avec la réalité de l’architecture, telle est la tâche. La gravité de la situation appelant impérativement une réaction, c’est la seule. C’est celle de la critique qui, en se plaçant face à la réalité, déligne les contours spéculaires de son contraire pour la faire apparaitre en faux, telle qu’elle est vraiment. C’est là une chose rendue difficile, sinon même impossible. Une telle critique présuppose un presque-rien d’éloignement, un pas de côté, par rapport au cercle magique du quotidien. Ceci représente un effort considérable, une gageure à l’encontre de la force contraignante de ce qui est. Pour être un tant soit peu convaincante, toute critique doit non seulement s’extraire de ce qu’elle prétend mettre à l’index, mais se défendre de la déformation, de la médiocrité, en provenance de son objet d’analyse. Plus la critique s’oppose frontalement à ce qui risque de la déterminer, au nom de l’objectivité, plus elle laisse percevoir au contraire la passion qui l’anime. Sans ne l’avoir jamais vraiment quittée, elle revient dans le giron de ce contre quoi elle dit vouloir s’élever. C’est le lot de la critique officielle autorisée. Toute critique doit mesurer les limites de l’impossibilité dans laquelle elle risque de s’enfermer vis-à-vis de ce qui est possible pour elle. Face à l’exigence à laquelle elle doit faire front, ce qui regarde la réalité ou l’irréalité de l’état de grâce de l’architecture devient presque indifférente. Intention. La volonté d’être à la hauteur de son temps s’épuise en vain bavardages. N’y résonne aucune espèce de nécessité de comprendre ce qui est. Y règne uniquement l’impératif de se rendre disponible à la rage imbécile de ce qui pour être, corrompt et détruit. A CONTRARIO scrute au creux du quotidien les chaines invisibles et les mécanismes silencieux qui déterminent et oppriment l’architecture. À travers de courts textes, de prises de vues, A CONTRARIO entreprend une critique de la situation actuelle dans laquelle elle est tenue engagée. Pour seulement être Art de Bâtir, l’Architecture doit être Art de Penser. A CONTRARIO est une invite à la réflexion, critique à mettre en pratique pour résister à ce qui est en prévision de ce qui vient. L’attitude à laquelle invite A CONTRARIO est la seule défendable. Sur le plan éthique, elle consiste à refuser toute instrumentalisation de l’existence ou des esprits à des fins idéologiques de quelque nature. Pour atténuer le caractère transgressif ou excessif qui ne manquera pas de lui être attribué, A CONTRARIO rappellera que, d’un point de vue moral, il appartient à chacun de demeurer aussi modeste que l’exige l’impératif catégorique de commencer à se réveiller à la réalité de ce monde.